La cathédrale de Nantes

Vue aérienne de la cathédrale, vers 1970. ADLA
Vue aérienne de la cathédrale, vers 1970. ADLA

Cinq édifices se sont succédé sur le même site depuis la christianisation de la cité. La cathédrale actuelle construite en quatre siècles et demi est cependant remarquable par son unité car chaque architecte a respecté les projets de ses prédécesseurs.

Les premières cathédrales

Le christianisme s’est établi assez tôt à Nantes, dès le 3e siècle, ainsi que tendent à le montrer le martyre des saints Donatien et Rogatien et les listes d’évêques de la cité. Il est donc vraisemblable que la jeune église nantaise s’est donnée rapidement une cathédrale dont le site respecte ce que l’on peut voir dans les autres cités épiscopales des Gaules : à l’intérieur de la cité close, près d’une porte et de la voie urbaine la plus importante.

Dédiée aux saints Pierre et Paul, la cathédrale de Nantes se trouvait sans doute au cœur d’un ensemble épiscopal comprenant entre autres un baptistère ainsi que le suggèrent les cuves baptismales des 4e et 6e siècles découvertes rue de l’Évêché. Les cathédrales les plus anciennes nous sont partiellement connues par des textes et des témoignages archéologiques. À un édifice du 4e siècle, succède un bâtiment achevé par saint Félix au 6e siècle, bâtiment qui a fait l’admiration des contemporains. Ruinée lors des invasions normandes, l’église est reconstruite au 10e siècle. Puis Benoît de Cornouaille évêque de Nantes de 1079 à 1111, fait construire une œuvre romane qui s’inspire des églises de pèlerinage pour accueillir les reliques des deux martyrs nantais ; mais l’œuvre ne semble pas avoir été développée comme Benoît l’avait envisagé et seul le chœur est connu par des gravures anciennes.

La cathédrale du 15e siècle

Au 15e siècle, les ducs de la dynastie des Montfort cherchent à affirmer l’indépendance du duché par des constructions prestigieuses. Les deux coseigneurs de la ville, le duc Jean V et son chancelier, l’évêque de Nantes, Jean de Malestroit, posent ensemble le 14 avril 1434, la première pierre de la façade. Cinquante ans plus tard, lorsque l’on place les portes de bronze, deux tours hautes de 63 m dominent cinq portails au riche programme iconographique en rapport avec les saints patrons du sanctuaire et des deux seigneuries de la ville.

L’architecture est l’œuvre de maîtres français, Guillaume de Dommartin (1434-1444) d’abord puis de Mathurin Rodier (1444-1480) dont les projets sont poursuivis jusqu’en 1520. Les travaux ne reprennent qu’après les guerres de Religion, des aides nouvelles dont celles du roi Louis XIII permettant d’élever les voûtes de la nef et de commencer le transept méridional. Au milieu du siècle, le chapitre décide de poursuivre l’œuvre et demande au conseil de la ville de repousser les remparts vers l’est (1658), mais après la mise en place des fondations des travées du chœur, la construction s’arrête faute d’argent.

À l’intérieur de la cathédrale, un arc triomphal de style baroque va assurer pendant plus de deux siècles la transition entre l’édifice gothique et le chœur roman.

19e siècle, l’achèvement

La cathédrale qui a souffert des dégradations révolutionnaires et surtout de l’explosion de la poudrière du château en 1800, change de statut avec le Concordat de 1802. Devenue église paroissiale, remplaçant six paroisses urbaines d’avant 1790, elle est toute entière placée sous le contrôle de l’évêque, mais son chœur roman trop étroit interdit d’y introduire une liturgie triomphale d’inspiration romaine qui a les préférences d’un clergé volontiers ultramontain.

En 1834, à une nouvelle demande de travaux partiels de restauration, le préfet Maurice Duval, au nom du gouvernement, répond par la proposition de reprendre les travaux arrêtés au 17e siècle. La proposition du préfet répond à la volonté de la monarchie de Juillet de se gagner l’appui d’un clergé légitimiste, elle rencontre aussi le goût nouveau pour le gothique. Les curés nantais ne sont pas insensibles à l’architecture néogothique ainsi que le montre au même moment la ferme volonté de l’abbé Fournier, qui impose les plans de l’architecte Lassus pour la reconstruction de l’église Saint Nicolas.

La campagne de travaux qui débute en 1840, va durer cinq décennies à cause des hésitations du Conseil des bâtiments civils et à cause surtout des difficultés d’un chantier auquel les entreprises ne sont pas préparées. Il faut redessiner des plans et réapprendre des tours de main disparus ; les architectes diocésains F. Seheult (1839 à 1849), T. Nau (1849-1865) et E. Boismen (1865-1884) travaillent dans le même esprit. Le chantier est cependant achevé par des Parisiens, l’architecte Sauvageot, élève de Viollet-Leduc et l’entrepreneur Millet, qui assurent la destruction de la coupole romane et l’élévation du chœur flamboyant. Ainsi le 27 décembre 1891, Mgr Lecoq peut enfin fêter solennellement l’achèvement de la cathédrale, 457 ans après la pose de la première pierre.

  • La cathédrale Saint-Pierre et le puits public, vers 1840. ADLA.
  • Dessin du tombeau de François II et de Marguerite de Foix, par Hersart du Buron, imprimé par Marcilly, 19e siècle. ADLA

20e siècle, les restaurations

Alors que la cathédrale a échappé aux bombardements alliés de septembre 1943, l’édifice est directement touché le 15 juin 1944 : 15 personnes trouvent la mort à l’entrée de la crypte et plusieurs chapelles ainsi que les verrières sont détruites. La reconstruction est très lente et le bâtiment n’est rouvert au culte qu’après 1955. L’orgue est mis en service en 1971 mais quelques semaines plus tard, le 28 janvier 1972, un incendie accidentel ravage la charpente, mettant en péril tout l’édifice. La nouvelle restauration est alors à la mesure de la peur des Nantais qui ont cru perdre leur cathédrale, le bâtiment est entièrement rénové et achevé à la fin des années 1980. Le 18 juillet 2020, un nouvel incendie, criminel, occasionne de nombreux dégâts. L'orgue notamment, l'un des fleurons de cet art en France, est intégralement détruit, tout comme la rosace principale de l'édifice et les vitraux d’Anne de Bretagne. Des travaux de reconstruction sont alors entrepris.

La cathédrale de Nantes possède deux tombeaux d’un grand intérêt : le tombeau de François II et de Marguerite de Foix, chef-d’œuvre de la Renaissance sauvé du vandalisme révolutionnaire et placé dans le transept sud en 1817, et le cénotaphe élevé en 1879 dans le transept nord en l’honneur du général Lamoricière.

  • Vue aérienne de la cathédrale, vers 1970. ADLA
  • Vue de la cathédrale Saint-Pierre à travers le passage de la cour Leroux (vers 1900). ADLA

  • Grande nef de la cathédrale de Nantes. Début 20e s. ADLA.
  • Incendie de la toiture de la cathédrale Saint-Pierre de Nantes, le 28 janvier 1972. ADLA.

À consulter en ligne

Cathédrale Saint-Pierre-et-Saint-Paul sur patrimonia.nantes.fr

À lire aux Archives départementales

  • Sylvain Chiffoleau, La cathédrale en feu (vendredi 28 Janvier 1972), Nantes, 1974.
  • Hervé Chouinard, Luc Caudroy, La restauration de la cathédrale de Nantes, dans Arts, Recherches et Créations, n° 70, 2001, p. 36-41.
  • Stéphane Haugommard, « La cathédrale de Nantes au XIXe siècle : besoins du culte et conservation archéologique, des impératifs inconciliables ? », dans Mémoires de la Société d'histoire et d'archéologie de Bretagne, 92, 2014, p. 481-487.
  • Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France, Nantes, la cathédrale, Paris / Nantes, 1991.
  • Jean-Michel Leniaud, « L'achèvement de la cathédrale de Nantes [1835-1904] », dans Bulletin de la Société archéologique et historique de Nantes et de Loire-Atlantique, t. 123, 1987, p. 229-279.